L’impôt sur le revenu des personnes physiques (I.R.P.P.) s’applique sur un revenu global, net, annuel, mais également disponible. Il résulte en effet de l’article 12 du Code général des impôts qu’un contribuable est passible de l’I.R.P.P., chaque année, à raison des bénéfices ou revenus qu’il réalise ou dont il dispose au cours de cette même année.
Si le texte ne définit pas ce qu’il convient d’entendre par revenu disponible, l’Administration fiscale, dans sa doctrine, considère qu’un revenu est disponible « lorsque sa perception ne dépend que de la seule volonté du bénéficiaire » (BOI-IR-BASE-10-10-10-40, § 20), et précise encore qu’un revenu peut être disponible indépendamment de l’usage qu’en fait le contribuable, et même s’il ne l’a pas effectivement perçu (BOI-IR-BASE-10-10-10-40, § 1).
En revanche, le contribuable qui peut justifier de l’impossibilité juridique ou matérielle dans laquelle il s’est trouvé de retirer ou prélever les revenus n’aura pas à supporter l’I.R.P.P. sur ces derniers, considérés alors comme indisponibles.
Cette impossibilité, toutefois, doit être parfaitement indépendante de la volonté du contribuable ; ainsi les revenus n’en demeurent-il pas moins disponibles si le contribuable lui-même choisit de ne pas les percevoir ou de ne pas les encaisser immédiatement.
C’est ce qu’est venu récemment rappeler le Conseil d’Etat dans un arrêt du 21 décembre 2022 (CE, 8e et 3e ch., 21 décembre 2022, n° 462533).
Dans cette affaire, un couple de contribuables, associés et dirigeants d’une SAS constituée en 2007, avaient vu, au terme d’un redressement fiscal, les dividendes inscrits au crédit de leurs comptes courants d’associés (à hauteur de 4.866.434 €), soumis à l’I.R.P.P., à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et aux contributions sociales.
Pour contester ce redressement et le rappel d’impôts qu’il induisait, les contribuables se prévalaient de l’existence d’une convention de subordination de leurs comptes courants, conclue à la constitution de la société et aux termes de laquelle ses actionnaires acceptaient de renoncer au remboursement de leurs comptes courants tant que la société n’avait pas intégralement remboursé ses dettes bancaires, contractées quant à elles après 2007.
L’Administration fiscale, à travers sa doctrine, s’était depuis longtemps déjà positionnée sur le caractère imposable des sommes inscrites au crédit d’un compte courant d’associé non bloqué, estimant que cette inscription entraînait une présomption de disponibilité (BOI-IR-BASE-10-10-10-40, § 100).
Annulant le jugement rendu par le tribunal administratif de Paris le 3 juin 2020, la cour administrative d’appel de Paris, par un arrêt du 26 janvier 2022, a cependant considéré que cette convention de blocage des comptes courants d’associés en faveur des établissements bancaires constituait une « contrainte juridique », laquelle caractérisait l’impossibilité juridique pour les contribuables associés de retirer les dividendes inscrits et, donc, d’en disposer.
Le Conseil d’Etat, pour sa part, remonte à l’origine de cette convention de subordination. Sans remettre en cause son antériorité par rapport à l’inscription des dividendes litigieux au crédit des comptes courants, il considère néanmoins que « l’indisponibilité des dividendes en litige procédait d’un acte de disposition de la part du contribuable ».
Dès lors, parce que la non-perception des dividendes ne résultait finalement que de la seule volonté des associés bénéficiaires, ces revenus devaient être considérés par l’Administration fiscale comme disponibles au titre de l’année de leur inscription en comptes courants.
La convention de blocage par laquelle un associé renonce à obtenir immédiatement remboursement de son compte courant, si elle permet d’offrir une sorte de garantie à l’établissement prêteur en dotant la structure qui emprunte de quasi-fonds propres, ne suffit cependant pas au plan fiscal à renverser la présomption de disponibilité des sommes inscrites au crédit de ces comptes.
Cette décision vient consolider une jurisprudence bien établie concernant la distinction à établir au plan fiscal entre revenu disponible et revenu perçu.
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